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les empires d’asie : préambule

en quelque sorte, facilitant d’autant mieux la descente que les nomades n’éprouvent pas l’obligation de modifier soudainement leurs conditions d’existence. Par le Turkestan russe et la Russie méridionale, le domaine des herbes atteint les bouches du Danube et rejoint la puzta hongroise. Vers le nord, l’épaisse zone forestière que traversent les fleuves sibériens présente cette particularité que, le long des berges de ces fleuves s’étendent en général des bandes herbues propres au passage des troupeaux. C’est du côté de l’Inde que les communications sont vraiment ardues à cause de la barrière qu’oppose le massif de l’Himalaya. On n’y peut guère pénétrer qu’en tournant l’obstacle par les étroits défilés ouvrant sur le Penjab et l’Afghanistan.

À l’heure où le rideau de l’histoire se lève, des sociétés civilisées sont déjà constituées en Mésopotamie — en voie de constitution en Chine et dans l’Hindoustan. Là seront des États plus ou moins solides, capables pourtant de résister à la pression incessante des nomades qui occupent le centre du continent. Ceux-ci s’écouleront alors par groupes restreints vers le nord ou le nord-ouest, à moins que, sous la conduite d’un chef plus hardi, plus entreprenant ou bien sous l’aiguillon de quelque famine résultant d’une épizootie ou d’un cataclysme atmosphérique, de véritables expéditions ne viennent à s’organiser, se déversant en hordes de pillage sur les terres fertiles de l’est et de l’ouest. Surgisse enfin un « seigneur de guerre », un Attila, un Gengis Khan, un Tamerlan, hommes doués d’une énergie, d’une ambition et d’une audace également exceptionnelles et ce seront de formidables raids emportant tout sur leur passage et aboutissant à la création d’empires énormes mais éphémères. Attila (449-453) ravage tout l’occident et menace Rome et Paris. Gengis Khan (1207-1227) s’empare à six ans de distance de Pékin et de Samarcande. Les soldats de son fils Ogotaï incendient Moscou, envahissent la Pologne et la Hongrie et menacent en même temps la Corée. Tamerlan (1369-1405) se rend maître d’Herat, de Tiflis, d’Ispahan puis, tourné vers l’Inde, en fait la conquête en quelques mois. De toutes ces annexions brutales, rien d’apparent ne demeure. Bien plus : l’attrait de la vie pastorale est tel que, le maître disparu, ses cavaliers souhaiteraient souvent se replier vers la steppe bien aimée. Après la mort d’Attila beaucoup des siens retournent d’où ils viennent et ceux qui se fixent en occident et se laissent muer en agriculteurs sédentaires