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entouré de la vaillante jeunesse des villages avoisinants ou de paroisse à paroisse se livraient ces bataill combats homériques que dont Mr. Siméon Luce [mot tracé] menti retrouve la mention dans les parchemins qu’il compulse — où le clergé d’Avranches lui-même, à certaine fête de l’année liturgique, descendait processionnellement sur la grève pour y faire une joyeuse partie de balle à la crosse. Tout cela est mort et lorsque le Directoire, tout rempli des pénétré des souvenirs de l’ancienne Grèce, veut établir sur le champ de mars parisien quelque chose qui rappelle les jeux olympiques, il lui manque un élément indispensable lui fait défaut : les concurrents. Il en vient sans doute, ces courses à pied que sur lesquelles je me propose de faire des recherches, comme il en vient des gamins, dans les foires, pour tenter l’ascension du mat de cocagne et gagner le gigot traditionnel ou la bouteille de bénédictine. Mais cela ne suffit pas pour alimenter des réunions athlétiques et faute d’un Racing Club et d’un Stade Français pour les organiser et les maintenir, les courses du Directoire vécurent ce que vivent les roses, l’espace d’un matin.

Vous me deman Je sais bien Il est vrai qu’en ce même temps, sur nos frontières, par-delà les frontières ensuite et bien loin, vers au pied des Pyramides, sur le Danube, vers Gibraltar en Espagne, autour sous les murs du Kremlin moscovite, les soldats de France pendant vingt ans d’une folle et sublime épopée donnent au monde l’un des spectacles les plus athlétiques qu’il ait jamais contemplés. Ils épuisent en ce court espace de temps, les forces de plusieurs siècles accumulées par la nation. Ce sang qu’ils versent, c’est le sang des joueurs de paume et des Sire de Gouberville, et non celui des libertins amollis et des libertins, des polissons de la Régence. C’est le sang de la France, déjà vicié dans les villes, intact encore dans les campagnes.

Et puis, messieurs, vous savez comment ils sont nos soldats. Quand ils n’ont plus de forces, ils en inventent !

Oh ! le grand besoin de repos qu’eût la France après cette longue crise de vaillance, et mon Dieu ! comme on comprend bien qu’elle s’en soit allée jouer aux dominos au lieu de faire travailler agir ses muscles lassés. Abreuvée de ses victoires, elle s’endormit un peu tandis qu’à côté d’elle, la défaite — une défaite noire, complète, épouvantable, avait réveillé des énergies qui ont abouti à une travaillé âprement depuis lors à l’œuvre détestable pour que vous savez : l’Empire d’Allemagne Allemand. C’est ainsi que naquit à Berlin l’athlétisme militaire.