l’idée d’un autre amour que l’amour filial lui paraît si nouvelle, qu’à peine elle la conçoit : peut-être lui eût-elle paru moins étrange, si son cœur avait eu de la place pour la recevoir ; peut-être que, si elle avait vu ses parents heureux, Smoloff aurait été aimé ; s’ils le sont un jour, peut-être l’aimera-t-elle ; mais, tant qu’ils seront dans l’infortune, elle demeurera fidèle à sa pieuse passion : pour en contenir deux, le cœur humain, tout vaste qu’il est, ne l’est point encore assez.
Élisabeth n’a jamais vécu dans le monde, elle en ignore les usages et les bienséances ; cependant, une sorte de pudeur, qui est comme l’instinct de la vertu, lui apprend qu’après l’aveu qu’elle vient d’entendre, une jeune fille ne doit point rester seule avec le jeune homme qui l’a osé faire. Elle marche vers la porte, elle va sortir. Smoloff, qui voit son dessein, lui dit :
« Élisabeth, vous aurais-je offensée ; ah ! j’atteste ce Dieu ici présent, que s’il y a de l’amour dans mon cœur, il n’y a