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d’un gain très considérable, et nul passager ne se serait exposé à faire le trajet avec eux. Élisabeth, sans examiner le péril, voulut entrer dans un de leurs bateaux ; ils la repoussèrent brusquement, en la traitant d’insensée, et jurant qu’ils ne permettraient pas qu’elle traversât le fleuve avant qu’il fût entièrement glacé. Elle leur demanda combien de temps il faudrait probablement attendre.

« Au moins deux semaines », répondirent-ils.

Alors elle résolut de passer sur-le-champ.

« Je vous en prie, leur dit-elle d’une voix suppliante, au nom de Dieu, aidez-moi à traverser le fleuve : je viens de par-delà Tobolsk ; je vais à Pétersbourg, demander à l’Empereur la grâce de mon père exilé en Sibérie ; et j’ai si peu d’argent que, si je demeurais quinze jours à Casan, il ne me resterait plus rien pour continuer ma route. »

Ces paroles touchèrent un des bateliers ; il prit Élisabeth par la main :

« Venez, lui dit-il, je vais essayer de vous conduire ; vous êtes une bonne fille, craignant Dieu et