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rencontraient toujours juste. Quelquefois il n’empêchait point de pleurer ; mais les larmes qu’on versait sur une douleur personnelle, il savait, en présentant l’image d’une infortune plus grande, les détourner sur les douleurs d’autrui, et, par le sentiment de la pitié, adoucir le sentiment du malheur.

C’est ainsi qu’en racontant ses longues traverses, et les désastres dont il avait été le témoin, peu à peu il attacha l’attention des exilés, les émut de compassion pour leurs frères, les conduisit à se dire intérieurement qu’en comparaison de tant d’infortunés, leur sort était bien doux encore. En effet, que n’avait-il point vu, que ne pouvait-il point dire, cet homme vénérable, qui, depuis soixante ans, à deux mille lieues de sa patrie, sous un ciel étranger, au milieu des persécutions, travaillait, sans se lasser jamais, à la conversion de barbares, qu’il appelait ses frères, et qui souvent étaient ses bourreaux ? Il avait vu la cour de Pékin, et l’avait étonnée par ses vastes connaissances, et