Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/33

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ministre qui la trouve encore jolie, et regrette la loge, à l’opéra, de celui qu’on renvoie. Elle aime le bruit, parce qu’elle n’a plus besoin de mystère, et qu’à quarante ans, pour être célèbre, une femme n’a plus que la ressource des ridicules. Elle parvient quelquefois à jouer un rôle : alors elle est aussi heureuse que si elle était jeune, elle a des esclaves qui l’encensent, des amis qui l’adorent, des amans qui l’estiment, et des bégueules qui l’envient. Si son jargon et ses airs ne parviennent pas à la sortir de l’obscurité, elle la combat par tant de travers, qu’elle finit par en triompher.

Elle se serait plus d’une fois trouvée assise près du parasite qui ne retient une nouvelle que pour s’introduire à une table ; près de l’amateur dramatique qui n’a jamais lu que l’affiche des spectacles ; de l’agioteur qui guette l’infortune publique pour corriger sourdement la sienne ; de ce vieux complaisant qui, disciple de Mercure, fait le prix d’une fille, la fait vendre, et vit par-dessus le marché ; près du désœuvré qui ne prend part aux troubles de l’État que pour se désennuyer un moment ; du rêveur qui s’enveloppe dans ses pensées, et n’en peut développer aucune ; du querelleur