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lugubre ? Chaque fois qu’il retentit, j’éprouve un frémissement involontaire… Pauvre Frédéric ! chaque coup t’éloigne de moi ; chaque instant qui s’écoule repousse vers le passé l’instant où je te voyais encore ; le temps l’éloigne, le dévore : ce n’est plus qu’une ombre fugitive que je ne puis saisir, et ces heures de félicité que je passais près de toi, sont déjà englouties par le néant. Accablante vérité ! les jours vont se succéder ; l’ordre général ne sera pas interrompu, et pourtant tu seras loin d’ici. La lumière reparaîtra sans toi, et mes tristes yeux, ouverts sur l’univers, n’y verront plus le seul être qui l’habite. Quel désert, mon Élise ! Je me perds dans une immensité sans rivage ; je suis accablée de l’éternité de la vie ; c’est en vain que je me débats pour échapper à moi-même, je succombe sous le poids d’une heure ; et pour aiguiser mon mal, la pensée, comme un vautour déchirant, vient m’entourer de toutes celles qui me sont encore réservées… Mais pourquoi te dis-je tout cela ? Mon projet était autre :