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les voies de l’amour

angoissante contre laquelle la volonté la plus énergique ne peut réagir. À ceux d’entre vous, mes amis, qui ne me connaissiez pas aussi intimement que Louis, j’aurais voulu cacher toujours ma vie ; mais les derniers souvenirs que Baptiste rappelait ont réveillé tant de douloureux échos en mon âme et en mon cœur qu’il m’a été impossible de retenir plus longtemps mes larmes. Autrement j’aurais suffoqué. Mais ai-je le droit, chers amis, de gâcher cette belle réunion pour le simple plaisir de m’attirer quelque marque de sympathie de votre part ? J’avais fait une promesse de toujours me taire ; je regrette amèrement mon oubli, ma faiblesse. Hélas ! je sens qu’il faut que je parle maintenant. Vous m’avez cru toujours heureux ; l’ai-je été autant que vous ? J’ai voulu le paraître ; j’ai souri souvent ; j’ai feint la joie souvent. Mais, hélas ! mon malheur a toujours pesé de tout son poids sur mon esprit, sur mon cœur, sur mon âme. Quand ma bouche semblait sourire, mon cœur saignait plus abondamment ; quand mes yeux prenaient un peu plus d’éclat, mon esprit s’affligeait davantage ; quand j’essayais de renaître à la vie, mon âme gémissait plus intérieurement. Le sourire, le bonheur, la vie, rien n’existe plus pour moi, sinon le bonheur de ma chère Andrée. J’ai trop souffert, je souffre trop depuis trop longtemps pour me rattacher à la vie et à ses sourires. Ma joie n’est jamais que factice ; ma vie n’est qu’une ombre qui