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les voies de l’amour

un assassin, un réprouvé, un maudit qui n’a plus qu’à traîner ses lourdes chaînes à travers une vie trop longue, trop accablante. Parfois je m’imagine qu’une malédiction est suspendue sur ma tête comme une épée de Damoclès, pour les pleurs que j’ai fait verser à mon Andrée dans mes moments d’oubli et de parjure ; mais je n’ai pas sitôt souhaité qu’elle me tombe dessus que les yeux attendris de mon enfant m’apparaissent et éloignent de moi l’idée de la mort que je désirerais comme un refuge à mon martyre de tous les jours. Souvent cependant j’appelle la mort à grands cris ; malheureusement elle ne me répond pas. Comment une pareille chose, un si grand malheur pouvaient-ils m’arriver sans que j’en mourusse ? On peut donc enlever la cervelle et le cœur de l’homme et le laisser vivre encore. Pourquoi un crime si énorme peut-il rester si longtemps impuni ? La prolongation de ma vie misérable n’est-elle pas une parcelle de l’expiation de mon forfait ? Je vis pour expier, mais je voudrais expier plus cruellement encore. Dans mes jours les plus sombres, seuls les vagissements ou le babil de mon enfant m’ont raccroché à la vie. Dans ses beaux yeux bleus, dans ses cheveux dorés, je retrouve mon Andrée et le souvenir qu’elle m’a laissé de la garde de notre enfant. Parfois je me reprends à la vie quand je contemple cette image de ma disparue si chérie. Je n’ai plus vécu que pour mon enfant.