Page:Cotret - Les voies de l'Amour, 1931.djvu/292

Cette page a été validée par deux contributeurs.
290
les voies de l’amour

qu’Andrée lui présentait de si bonne grâce. Jamais il n’avait senti autant de douceur. Il dit d’une voix tremblotante qu’il cherchait à raffermir : « Andrée, je ne vois que du bonheur, beaucoup de bonheur dans toutes les lignes de votre main ». Et laissant avec regret ces petits doigts qu’il avait à peine effleurés, il mit sa main dans la poche de son veston et en retira une pièce de monnaie qu’il présenta à Andrée. « Andrée, dit-il, reconnaissez-vous cette pièce ? Un jour un mendiant déguenillé, crotté, abruti par l’alcool et les narcotiques, voulut revoir celle qu’il avait tant aimée d’un amour insensé. Il se présenta chez elle et on l’introduisit dans la chambre d’une mourante qui lui fit l’aumône d’une pièce de monnaie. Quand le mendiant vit l’œuvre néfaste de son crime, quand il crut que le tombeau allait se refermer sur le corps de cette sainte qui avait conservé intact un amour datant de l’enfance et qui donnait, au nom de son fiancé oublieux, une obole si généreuse à lui le criminel, le réprouvé, il eut pitié et le remords le conduisit aux pieds de son ami qu’il avait si cruellement joué. Il avoua son crime et promit de réparer le mal. Ce mendiant c’était moi ; la petite mourante, c’était vous qui m’avez fait cette aumône régénératrice. Mendiant sordide, je ne pouvais baiser la main qui me tendait la pièce de monnaie, mais cette pièce je l’ai baisée souvent et dévotement comme une médaille miraculeuse. Si je n’y vois plus, à force