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les voies de l’amour

compatissants et généreux. Que de reconnaissance je vous dois et comment m’acquitterai-je jamais envers vous deux ?

« Jean, lui répondis-je, la plus grande marque de reconnaissance que tu puisses nous montrer, à Andrée et à moi c’est d’être mon témoin. Andrée le veut et je le veux ; je l’exige comme Andrée l’exige.

« Un soir, un mois après cet entretien, dans le grand salon de la demeure des Morin tout illuminée, c’était une fête de famille tout intime. Assis devant la table recouverte d’un tapis en chenille, en redingote jaunie, râpée, boutonnée jusqu’au col, le vieux notaire du village, ami de la famille, avait étalé quelques feuilles de papier grand format. De sa main droite, barbouillée d’encre d’un noir douteux, il jouait distraitement dans le gros encrier avec sa plume qu’il secouait ensuite sur le tapis, qu’il accrochait à son oreille ou qu’il portait à sa bouche par le mauvais bout. Sa main gauche tapotait d’un mouvement fébrile le papier grand format en y imprimant des taches jaunâtres. Ses yeux ternes, regardant par-dessus ses bésicles qui tenaient difficilement sur le bout de son nez, se dirigeaient tour à tour sur les figures des assistants, mais le plus souvent vers la porte, dans l’espoir d’y voir apparaître le dernier témoin attendu avec impatience. Près de lui, monsieur et madame Morin