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les voies de l’amour

dans le jardin. Elle sentait encore sa grande faiblesse. Elle s’en irritait et parfois le découragement s’emparait d’elle et lui faisait verser des larmes abondantes sur ce qu’elle appelait son manque d’énergie. Un matin, elle s’éveilla toute ragaillardie. Toute la nuit, dans de beaux rêves, elle avait parcouru seule toutes les allées du jardin. Elle avait suivi Jacques, le jardinier, sur les plates-bandes, lui indiquant comment couper tel taillis et tel autre, comment élaguer telles branches aux arbres d’ornementation pour en augmenter la beauté et leur donner les formes les plus variées, telles que palmettes horizontales et obliques, vase, rideau, dôme, colonne. Elle conseillait à Jacques de donner plus d’eau à telle plante fleurie toujours assoiffée, d’abriter un peu plus une autre trop sensible aux rayons ardents du soleil. Puis elle était allée dans la basse-cour jeter des miettes aux poussins qu’elle prenait, qu’elle mettait dans les plis de sa jupe et dans la grande poche de son tablier pour caresser leurs petits dos duvetés. Elle s’était amusée à pousser les canetons dans l’étang pour admirer leur baignade fantaisiste. Et puis elle avait appelé sa belle chatte, une descendante de l’arrière-arrière grand’mère que lui avait donnée son Michel lorsqu’elle était toute petite, toute petite. La chatte qui courait après les moineaux lui avait obéi et était revenue en sautillant se frôler sur le bas de sa jupe, le gros dos rond, la tête toute penchée,