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les voies de l’amour

vous aurai dit le dernier mot de ma confession, si l’homme à qui j’aurai confié mes secrets horribles, est trop mortel pour m’absoudre, peut-être que le médecin qui est si charitable, que l’âme qui est si généreuse me pardonneront et me laisseront terminer sans trop de remords le peu de chemin que j’ai encore à parcourir sur la terre en traînant moins péniblement ma guenille souffreteuse. »

« J’écoutais paisiblement cet infortuné qui me semblait un délirant. Son regard fixe paraissait chercher dans un passé lointain des faits imaginaires. Sa voix sourde, chevrotante, prenait parfois des accents plus vifs ; parfois elle avait un ton larmoyant. Parfois il se taisait comme pour chercher ou coordonner ses idées. Il revenait quelquefois sur des faits qu’il croyait avoir oublié de mentionner. Souvent il me répétait : « docteur, ne m’interrompez pas ; ne me questionnez pas, je vous dirai tout ». Et cependant je ne soufflais mot ; j’écoutais machinalement comme on prête l’oreille aux histoires abracadabrantes d’un aliéné. Parfois j’oubliais la présence de ce fou et mes pensées, voyageant ailleurs, erraient dans mon village natal que j’avais oublié depuis si longtemps. J’y revoyais la petite Andrée, pleine de vie, cueillant des fleurs pour m’en faire un bouquet au langage silencieux dont je comprenais toujours le vrai sens, et je l’apercevais aussi, comme je l’avais vue la veille, dans sa grande chambre dont les rideaux fermés