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les voies de l’amour

des cadavres dans les cimetières et les charniers était passé, car je suis certain que tu n’aurais jamais été aussi effronté, et que tu n’aurais certainement pas embrassé la profession que tu as exercée avec tant de succès et d’honneur. Y penses-tu ? J’en frissonne pour toi. Te vois-tu aller le soir, plutôt la nuit quand il fait bien sombre, quand de gros nuages noirs roulent dans le ciel chargé d’électricité, à l’heure où les morts sortent de leur tombeau pour parcourir les campagnes et effrayer les campagnards superstitieux, à l’heure où les feux-follets, comme des âmes en peine, s’élèvent des tertres funéraires, te vois-tu aller, dis-je, dans la nuit, remuer la terre nouvellement jetée sur un cercueil dont tu enlèves le couvercle pour en arracher le corps d’une jeune fille, d’une vierge. Tu l’enveloppes dans ton paletot, et tu la déposes là près de toi pour remettre en place le couvercle du cercueil. Et pendant que tu remplis la fosse pour cacher ton vol, ton sacrilège, aurais-tu pu entendre sans frémir l’écho réveillé par les sons lugubres que la terre et les pierres tombant sur le cercueil vide auraient rendus ? Aller faire toute cette besogne macabre, l’aurais-tu pu ? Et que dire de tes sensations, de ton courage, de ta bravoure pendant que tu enveloppes la morte dans ton manteau et que tu la tiens bien serrée dans tes bras, si la lune, profitant d’une éclaircie entre deux nuages, a projeté sa lumière sur ton être, produisant devant toi