y avait-il une autre cause qui la rapprochait de moi, je l’ai ignoré longtemps ; ce n’est que quelques années plus tard que je compris cette énigme. Quand Jean disparut pour quelque temps, Béatrice ne se gênait plus de venir très fréquemment à ma chambre. Elle ne craignait plus les foudres de sa sœur et savait lui tenir tête. Me rappeler le nombre de fois que j’ai été témoin impassible des scènes de jalousie parfois violentes entre les deux sœurs m’est complètement impossible. Ces scènes se renouvelaient si souvent dans ma chambre que j’eus beaucoup de misère à étudier mes examens de doctorat. J’étais obligé parfois de les inviter à vider leur querelle ailleurs, et c’était alors à qui sortirait la dernière. J’attendais avec impatience le retour de Jean pour retrouver quelque repos. Parfois je me demandais comment se terminerait cette querelle entre les deux sœurs. Je partirais bientôt pour m’établir dans une campagne et je ne voulais pas en quittant cette maison, où j’avais été gâté comme un enfant choyé, laisser comme souvenir un brandon de discorde. J’aimais assez Lucille pour en faire la compagne de ma vie. Je le lui avais prouvé plus d’une fois, et même nous nous étions engagés. Souvent dans nos tête-à-tête nous avions fait des projets d’avenir ; nous avions organisé notre vie future. Mais, hélas ! l’arrivée inopportune ou la présence malencontreuse de Béatrice dans ma chambre coupaient court à nos entretiens intimes qui
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