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regard, et cependant Andrée, en dépit de son amour pour Jean, paraît s’étioler comme la fleur privée de lumière. Ses yeux, sans éclat, se cernent d’une aréole brune ; ses joues se fanent ; ses lèvres pâles ont un sourire contraint ; sa démarche s’alanguit. D’autre part, je me disais encore : si Andrée n’aime pas Jean, pourquoi le revoit-elle aussi souvent ? Pourquoi tous ses voyages à Montréal ? Pourquoi accepte-t-elle toutes les invitations au bal, aux soirées dansantes, au théâtre ? Est-ce par coquetterie ou par dépit ?

« Je n’étais pas assez perspicace pour trouver la solution de ce problème qui m’intriguait au plus haut point. J’aimais tant Lucille et j’avais tant oublié Andrée que je ne pouvais croire que cette dernière pût encore m’aimer ou seulement penser à moi. Dans la tristesse et la mélancolie de son regard, dans la pâleur de ses joues et l’amertume de son demi-sourire, je n’aurais jamais imaginé la persistance et la survivance de son amour pour moi. Dans tout l’affaissement de son être, Andrée me paraissait plus belle, plus distinguée que jamais. Ses toilettes plus riches, plus élégantes lui seyaient à merveille et lui donnaient ce cachet de beauté et de distinction qui en faisait la reine des réunions où Jean la conduisait par orgueil et par amour. Il paraissait tant l’aimer et cependant Andrée semblait le payer de retour par une indifférence si complète que je ne com-