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les voies de l’amour

À la fin je trouvai tant de charmes dans la compagnie de Lucille que je ne voulais plus retourner dans mon village. Je ne tenais plus à revoir Andrée qui m’aurait paru insipide au souvenir de Lucille. Sous prétexte de faire de fortes études médicales et de suivre constamment l’hôpital pour acquérir une expérience plus consommée des maladies, je passai tous mes congés et mes vacances à Montréal, avec Lucille, dans ma chambre, en promenade dans les rues fashionables, dans les soirées dansantes ou les théâtres. Quand mon père ou ma mère me reprochaient de les négliger, je leur répondais que je consacrais tout mon temps à l’étude, et qu’ils seraient fiers un jour d’avoir en leur fils un médecin célèbre et un savant. Si j’allais quelquefois chez mes parents, ce qui était très rare, je m’isolais dans ma chambre sous prétexte de continuer mes études, et je n’en sortais que lorsque j’étais certain de ne voir que mon père ou ma mère. Si par hasard je rencontrais Andrée avec d’autres personnes, j’étais poli avec elle et rien de plus. Je ne la recherchais plus. Je ne lui trouvais aucune grâce, aucune élégance. Sa conversation me semblait insipide ; ses gestes me paraissaient maniérés. Le son de sa voix ne m’était pas désagréable, mais je n’y trouvais plus cette mélodie qui m’enchantait autrefois. Son regard était insignifiant, fade, et ses lèvres n’avaient plus le même sourire aimable que j’aimais tant provoquer auparavant.