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les voies de l’amour

Ses mains et les manches de sa toge étaient plus à la portée et il ne se gênait pas de les employer pour enlever la craie du tableau ou l’épaisse poussière qui mettait une teinte de grisaille sur la toile verte de la tribune.

« Quand j’envoyai ce portrait à Andrée, elle dut sourire car elle me répondit que j’avais beaucoup d’admiration pour le professeur mais peu de respect pour l’homme. Comment voulez-vous que je dépeignisse mieux Duval ? Je ne l’ai jamais vu autrement qu’à travers les gros cils de mes paupières encore à demi fermées par le sommeil. Il donnait ses cours à huit heures du matin, et pensez-vous qu’à une heure aussi matinale les yeux d’un étudiant sont bien dessillés et qu’ils ne voient pas plus d’ombre que de lumière. Quant aux professeurs des matières finales, je n’ai pas pu les décrire à Andrée, parce qu’alors je ne correspondais plus avec elle ; j’étais tout à mon amour avec Lucille, Lucille, ma flamme.


« Mes premières lettres à Andrée étaient très longues. Tous les soirs, avant de me mettre au lit, je lui racontais avec force détails tous les événements de la journée. Pour un campagnard comme moi, frais émoulu du collège, curieux, fureteur, inquisiteur, je ne tarissais pas dans mes descriptions et mes nouvelles. J’étais pire que le reporter qui voit ce que les autres ne peuvent découvrir. Je lui présentais mes nouveaux amis et mes