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les voies de l’amour

pénétrons en effet dans une cave froide comme un charnier un soir d’automne. Une lumière douteuse, fournie par un pauvre bec de gaz, et un tout petit vasistas, percé dans le gros mur en pierre, ajoutent encore à la ressemblance des oubliettes. Les quatre murs épais, lézardés et portant à cent endroits les traces du grattoir avec lequel on a cherché à enlever les moisissures, forment un carré d’une dizaine de pieds. Le parquet, si l’on peut appeler ainsi l’assemblage des pierres et des briques qui couvrent le sol, est tout craquelé et raboteux. D’un côté de cet antre, quelques planches forment des sièges crasseux sur lesquels on n’ose pas s’asseoir. Le plafond bas, formé de planches disjointes, est noirci par d’épaisses couches de fumée qui se dégage constamment du pauvre bec de gaz qui répand une lumière blafarde sur la table d’autopsie placée au-dessous. Sur cette table en zinc, percée au milieu d’une petite ouverture qui laisse égoutter les liquides nauséabonds dans un seau, est étendu, dans une rigidité complète, le cadavre nu d’un pauvre vieux, mort la nuit précédente. Pauvre vieux ! il est poilu comme un singe, sec et parcheminé comme une momie dont il a la couleur.

« Il fait froid dans cette cave ; il y règne le froid de la mort, le froid de l’humidité, et surtout le froid de la peur. J’en ai la chair de poule et je fais des efforts inouïs pour ne pas grelotter. Je n’ose pas ouvrir la bouche pour