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les voies de l’amour

saient de plus en plus rares ? Était-ce le dépit de me croire ainsi abandonné de celle à qui j’avais voué tout mon amour ? Et c’est ce soir-là que je commençai à dessiner le portrait de Lucille que j’osai comparer avantageusement avec celui d’Andrée. Ô amour ! que tu es trompeur dans tes artifices ! que de tes sujets tu as rendus aveugles !

« Ce soir-là, Lucille, assise la jambe croisée, en face de moi, battait la mesure de son pied en accord avec les accents de sa voix qui me paraissait un chant plus doux que jamais, et je regardais presque en extase le va-et-vient du beau petit soulier pointu chaussant si admirablement un pied qu’aurait envié une princesse ; et je me disais : si Andrée avait un soulier aussi délicat, un pied aussi mignon : mais, non, ça ne se peut pas, Andrée est une campagnarde et Lucille une citadine. Et la jambe de Lucille, que la jupe découvrait à la hauteur du genou, était fine, nerveuse, recouverte d’un bas d’un rose tendre qui en augmentait davantage l’attrait, et je ne retrouvais plus la finesse de la jambe d’Andrée.

« Oh ! il me venait des idées folles, des pensées absurdes ; me jeter à ses genoux et les presser entre mes bras convulsés ; enlever le petit soulier ; tenir ce pied mignon dans mes deux mains, le porter à mes lèvres et y laisser l’empreinte de mes baisers ardents… Lucille me parlait et j’étais absorbé par ces idées fixes. Elle sentait