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les voies de l’amour

les yeux du serpent qui fascinent. Enfin, petit à petit, la gêne se dissipant, je finis par m’enhardir et j’osai parfois regarder cette jeune fille qui semblait devenir quelque chose dans ma vie. C’était l’heure où un amour nouveau commençait son œuvre. Le souvenir de mon Andrée me revenait encore, mais moins fréquemment et son image, moins persistante, plus fugitive, s’estompait rapidement, s’évanouissait pour renaître sous l’effigie de l’aînée des deux jeunes filles. Parfois, au milieu de mes rêves, je voyais dans un ciel azuré, sans tache, des vapeurs ou des gaz apparaître tout à coup à l’horizon, monter, s’élargir, prendre des formes variées, puis se condenser en des contours découpant la silhouette élégante de la jeune fille de la pension ; et quand je m’éveillais l’image nouvelle persistait et je la contemplais avec plaisir et amour comme un astre brillant.

« Quand je m’aperçus que j’aimais réellement cette jeune fille, je l’avais peinte non pas à la façon des artistes en commençant par la tête, ébauchant l’ovale de la figure, l’arc des yeux, les ailes du nez, l’accent de la bouche, les formes de la gorge, pour terminer par le cadre dans lequel se jouait cette beauté. Un soir, après le souper, étant monté dans ma chambre pour rédiger mes notes de cours, j’entendis frapper légèrement à ma porte et l’aînée entrait un journal à la main. Sans invitation aucune, elle prit une chaise et s’assit en face de moi en se