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Ma plume, certes, n’a ni l’éclat de la poésie qui éblouit, ni la puissance de l’éloquence qui subjugue, mais elle tâche d’être par-tout l’interprète de l’Expérience, devant laquelle la Spéculation doit un jour s’incliner. Qu’on efface donc l’écrivain, si l’on veut, mais qu’on rende quelque justice à l’homme. —

J’avoue enfin que, borné dès mon enfance aux études arides de la toge, je ne puis écrire tout-au-plus que pour les gens du monde, pour le peuple, plutôt que pour les Savans. Ce qui est un grand défaut, car le peuple ne connaît que ce que les savans veulent bien lui faire savoir ; le peuple ! toujours, quoique souverain, le monopole ou la dupe de Coteries ou de Camerillas, d’habiles ou d’ambitieux, partagés en petites et grandes tyrannies qui se succèdent sous différentes dénominations, plus ou moins fallacieuses ; et la République des lettres n’est pas les moins en main dans ce partage.

Je lui conseille, à ce bon peuple, de troquer sa souveraineté contre quelque chose de moins chimérique, de plus utile, de plus durable : entr’autres, contre une instruction plus étendue, plus solide. Alors, pouvant lire et comprendre par lui-même, il deviendra plus clairvoyant et sera moins trompé. Alors, en apprenant mieux les devoirs de l’homme, il se rendra plus digne d’en obtenir les droits et, se mettant plus raisonnablement en rapport avec le ciel et la terre, il saura mieux comment on doit vivre et mourir. —