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dit l’oiseau. Il réussit à le prendre et le met dans une cage. Un jour, le yogî vient mendier au palais. L’oiseau crie aussitôt : « Voilà le yogî ! » Le roi demande des explications au yogî, lequel, s’étant fait promettre la vie sauve, raconte tout ce qui s’est passé. Le roi lui fait alors rendre à l’oiseau sa première forme.


Dans ce troisième conte indien, on a vu reparaître, avec le rire et les pleurs de l’oiseau, les dons merveilleux du premier conte ; mais ces dons, qui est-ce qui les a faits à l’héroïne ? très probablement le serpent reconnaissant. Il y a là une lacune ; et une autre lacune, c’est qu’il n’est pas dit par quel procédé magique le yogî transforme la princesse en oiseau.

L’épingle magique va de nouveau jouer son rôle dans un quatrième conte indien, provenant vraisemblablement de Bénarès et bizarrement altéré[1].

Dans l’état actuel du conte, il s’agit d’une méchante reine, qui succède à une bonne reine, morte en laissant deux enfants. Après l’histoire, assez embrouillée, des enfants tués par la marâtre, puis revenant à la vie, et de la punition de la marâtre, brûlée par ordre du roi, le récit se poursuit ainsi :

La reine morte demande à Khudâ (Dieu)[2] de lui permettre d’aller visiter son mari et ses enfants. Khudâ lui permet d’y aller, mais non sous forme humaine ; il la change en un bel oiseau et lui met une épingle dans la tête en disant que, quand l’épingle sera enlevée, l’oiseau deviendra femme. L’oiseau va se percher, la nuit, sur un grand arbre à la porte du palais, et il demande au portier comment va le roi, puis comment vont les enfants, les serviteurs, les chameaux, les chevaux, les éléphants. Et il ajoute : « Quel grand imbécile est votre roi ! » Alors il se met à pleurer, et des perles tombent de ses yeux ; ensuite il se met à rire, et de gros rubis tombent de son bec. Le lendemain, le portier ramasse ces perles et ces rubis, sans en connaître la valeur, et il fait de même chaque matin, l’oiseau revenant toutes les nuits. Il finit par en avoir tout un tas.

Un jour, un fakir vient mendier chez le portier, et celui-ci, n’ayant pas autre chose sous la main, lui donne une poignée de perles et de rubis. Le fakir se présente ensuite chez le roi, qui lui donne une poignée de

  1. Miss M. Stokes, Indian Fairy Tales (Londres, 1880), n° 2, et, pour la provenance du conte, p. 5, en bas.
  2. Dans les vingt-huit contes qui ont été racontés à Miss Maives Stokes et à sa mère par deux femmes hindoues à leur service, le nom d’un dieu de l’Inde ne figure que deux fois (Mahàdeo, c’est-à-dire Siva, dans les n°s 15 et 29), bien que les conteuses ne fussent pas chrétiennes. Partout ailleurs il est parlé de Khudâ, que miss Stokes traduit par « Dieu » {God). Voir p. 237.