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que celui de leurs descendants, faisait certainement contraste avec le teint des précédents habitants du pays, desquels sont issues les populations négroïdes dravidiennes, Tamouls, Télougous, etc ? Nous ne saurions nous prononcer là-dessus ; mais nous enregistrerons un renseignement curieux, fourni par Mme Stokes (p. 238) : quand on veut féliciter un Hindou de sa bravoure, on lui dit : « Votre figure est rouge » ou « Vos joues sont rouges ». Et, dans le Pandjâb, quand un naturel du pays parle d’un autre avec mépris, il dit : « C’est un homme noir ».

Si les Anglais, au teint blanc et rouge, s’étaient établis dans l’Inde à une époque suffisamment reculée, on pourrait, à la rigueur, faire dater de cette époque l’introduction dans le folklore hindou de ce trait de la coloration particulière qui distingue les personnages plus ou moins merveilleux dont nous venons de donner une liste. Mais les premiers établissements des Anglais dans la péninsule ne datent pas de trois siècles. C’est peu dans la longue histoire du folklore indien.

On a donc dans l’Inde, outre la connaissance de la neige, l’idée d’un teint d’une blancheur éclatante et aussi de joues bien rouges. Les Hindous possèdent, par conséquent, et certainement depuis longtemps, les éléments nécessaires à la création de l’épisode du Sang sur la neige.

Est-ce que cet épisode, une fois créé, aurait été plus difficile à accepter dans l’Inde, que l’histoire de la « Sorcière blanche » aux cheveux d’or ? Mais vraiment, est-ce qu’en Asie centrale, théoriquement, le milieu ne le rendait pas inacceptable tout autant, pour le moins ? Les Mongols et les Tarantchi ne sont pas simplement des blancs brunis, comme les Hindous ; ce sont des jaunes. Et néanmoins cette « comparaison de la beauté avec la neige et le sang » s’est acclimatée chez eux.

Nous pourrions joindre, — à ce point de vue, — aux populations de l’Asie centrale celles qui se trouvent à l’autre point extrême où l’on a rencontré notre épisode, les populations maures d’Algérie. À Blida, à Médéa, etc., les conteuses « ont, en général, nous dit M. Desparmet, la peau brun foncé ou couleur chocolat » et « sont manifestement métissées de sang nègre » ; ce qui n’empêche pas le Sang sur la neige de se raconter à Blida, à Médéa. Mais nous les