Page:Cosquin - Les Contes indiens et l’Occident, 1922.djvu/243

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 231 —


deux formes distinctes (selon qu’il s’agit d’une jeune fille ou d’une femme mariée).

Dans la première, une jeune fille se blesse à la main en coupant un fruit, et son sang coule sur la neige. Et un passant lui dit que ce mélange des couleurs fait penser à certain beau prince. Cette forme, — variante du conte espagnol de l’Estramadure et aussi du conte italien du Mantouan, l’un et l’autre cités plus haut, — se rencontre, extrêmement altérée, dans un conte recueilli sur la côte occidentale de l’Afrique, dans la colonie portugaise d’Angola, et provenant certainement de la mère-patrie. Nous renvoyons, à ce sujet, aux observations que nous avons présentées dans notre Monographie B (Revue, juillet 1914, p. 244 ; — p. 145 du tiré à part).

La seconde forme est moins rare. Voici d’abord un conte allemand de Poméranie (Grimm, n° 47) :

Un jour en hiver, une femme sans enfants est en train de peler une pomme devant sa maison ; elle se coupe, et le sang tombe sur la neige. « Ah ! dit-elle, si j’avais un enfant rouge comme sang et blanc comme neige ! »

Même introduction dans un conte de la Russie blanche, de même type[1].

Un second conte allemand, résumé par Guillaume Grimm dans les remarques du même n° 47, a un trait assez singulier : c’est pendant une promenade en traîneau, faite avec le roi, qu’une reine se coupe en pelant une pomme et que le sang tache la neige.

Dans le conte hessois de Sneewittchen, « Blanche-comme-neige » (Grimm, n° 53), — devenu conte-type en folklore, — une reine est en train de coudre à sa fenêtre, un jour qu’il neige à gros flocons ; tandis qu’elle regarde, elle se pique le doigt, et trois gouttes de sang tombent sur la neige. Et elle souhaite un enfant aussi blanc que la neige, aussi rouge que le sang… et aussi noir que l’encadrement de sa fenêtre ; car il faut savoir que la fenêtre près de laquelle la reine est assise, a un encadrement de bois d’ébène. Et, de cette façon, le conte peut ajouter le noir aux deux autres couleurs.

Dans un conte norvégien[2], nous retrouvons la reine en traîneau

  1. Amélie Godin, Polnische Volks-Mærchen [traduits de Glinski] (Leipzig, s. d.)
  2. Asbjoernsen, tome II de la traduction allemande, Norwegische Volksmærchen (Berlin 1847), n° 3.