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— « Ce bon espoir ne sera pas déçu !
S’écrie Adab. Çà, qu’on me débarasse
De tous ces gens, insupportable race,
De qui le dos n’est point assez cossu !
Je les bannis ! Qui m’a donné des drôles
Si réguliers du torse et des épaules,
Si droits, enfin, quand leur maître est bossu ? »

Pour vous brouiller avec ma poésie,
Peut-être ici des critiques chagrins,
Vont affirmer qu’aucun peuple d’Asie,
Même parmi les Turcs de fantaisie,
N’eut à la fois deux pareils souverains…
Ou demander, avec un froid sourire,
Sous quel kalife ? en quel temps de l’hégire ?
Quel âge avaient Adab et Zuléma,
Et s’ils juraient par Malom ou Brama ?…
Quoi ? diront-ils, point d’eunuque à peau noire,
Ni de sérail ? Le moyen de vous croire !
— N’écoutez pas ces pédants tracassiers !
De tels sujets sont pour eux lettres closes :
Le nécromant qui m’a conté ces choses
En sait plus qu’eux, qui ne sont pas sorciers !

D’urgence donc, pour le salut du prince,
On promulgua de province en province,
Le grand édit, qui fut surtout goûté
Des bourgeois turcs ayant le dos voûté.
Les gens bien faits aussitôt décampèrent ;
Tout homme droit de la cour fut exclus ;