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vivantes qui peuplent la terre et les eaux dont Muteczuma put avoir connaissance, il les fit reproduire en or, argent, pierreries et plumes avec une telle perfection, qu’elles paraissaient naturelles. Il m’en donna de toutes sortes pour Votre Altesse, sans parler d’autres que je lui demandais et qu’il me fit fabriquer en or : crucifix, images de saints, médailles, bijoux, colliers et autres objets de notre pays, qu’on imita de façon merveilleuse. Il revint également à Votre Altesse, du cinquième de l’argent perçu, cent et tant de marcs que je livrai aux artistes indiens pour en faire des plats petits et grands, des écuelles, des tasses et des cuillères, qu’ils fabriquèrent avec une perfection que nous ne saurions dire. Muteczuma me fit en outre présent de pièces d’étoffe de sa garde-robe d’une telle finesse, que tissées de coton sans mélange de soie, il ne pourrait s’en tisser d’aussi belles au monde, ni de couleurs si vives et si diverses. Il y avait, entre autres, des vêtements d’hommes et de femmes absolument merveilleux ; je citerai des couvertures de lit, qui composées de soie ne pourraient les égaler. Il y avait d’autres tissus ressemblant à des tapisseries qui pourraient décorer des salons et des églises ; il y avait aussi des couvre-pieds et des couvertures tissées de plumes et de coton, de toutes les couleurs et les plus merveilleuses qu’on pût voir, et tant d’autres choses encore que je ne saurais les dépeindre à Votre Majesté. Il me donna une douzaine de sarbacanes avec lesquelles il chasse les oiseaux, dont je ne pourrai dire l’élégante perfection ; car elles étaient couvertes de fines peintures aux nuances les plus délicates, où se trouvaient représentés, dans toutes les attitudes, des oiseaux, des animaux, des arbres et des fleurs, et dont les points de mire étaient formés par des grains d’or ; il y en avait un autre dans le milieu également bien ciselé. Il me donna en même temps un carnier en filet d’or pour les petites balles qui seraient en or. Il me donna des moules en or, et une foule d’autres choses.

Pour rendre compte à Votre Royale Excellence, Très Puissant Seigneur, de la grandeur des choses extraordinaires et superbes de cette grande ville de Tenochtitlan, et de la magnificence du service de Muteczuma, son souverain, des rites et cérémonies de cette nation, de l’ordre qui règne dans le gouverne-