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Le lendemain, avant qu’il fît jour et sans être observé, je me dirigeai d’un autre côté avec mes cavaliers, cent hommes à pied et mon contingent indien ; je détruisis aux Ttascaltecs dix villages dont quelques-uns de plus de trois mille cases, et là je n’eus à combattre que les gens de ces villages. Comme nous marchions sous l’étendard de la croix et que nous combattions pour notre foi et les intérêts de Votre Majesté sacrée, Dieu dans sa miséricorde nous accorda une telle victoire, que nous tuâmes un grand nombre d’ennemis sans perdre aucun des nôtres. Un peu après midi, alors que les Indiens se réunissaient de toutes parts, nous rentrions au camp, victorieux.

Le jour suivant, des envoyés des caciques arrivèrent au camp, chargés de me dire que leurs maîtres désiraient être mes amis et les vassaux de Votre Altesse et qu’ils me priaient de pardonner le passé. Ils m’apportaient des vivres et certains plumages dont ils se servent et tiennent pour fort précieux. Je leur répondis qu’ils avaient très mal agi, mais que je leur pardonnais.

Le lendemain, arrivèrent cinquante autres Indiens qui, selon les apparences, devaient être des principaux ; ils nous apportaient des vivres et se mirent à examiner les entrées et les sorties du camp et les logements où nous étions installés. Mes alliés de Cempoal m’engagèrent à prendre garde à ces Indiens, m’assurant que c’étaient de mauvaises gens qui venaient pour espionner et pas autre chose. J’en fis enlever un sans que ses compagnons s’en aperçussent et l’interrogeai secrètement au moyen de mes interprètes ; je lui fis peur pour qu’il me dît la vérité : il m’avoua que Sintengal (Xicotencatl), capitaine général de la province, s’était caché derrière certaines élévations voisines de notre camp avec une multitude d’Indiens, pour nous attaquer pendant la nuit ; nous ayant trouvés invincibles le jour, ils voulaient essayer la nuit, parce qu’alors ils craindraient moins les chevaux, les couleuvrines et uns épées. On les avait donc envoyés pour étudier le camp, les entrées et les sorties et voir comment ils pourraient incendier nos paillotes.

Je fis aussitôt saisir un autre Indien qui confirma ce qu’avait dit le précédent ; j’en arrêtai cinq ou six autres qui tous avouèrent la même chose. Alors je m’emparai sur l’heure des cin-