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sait, il en serait puni. Je l’engageai donc en reconnaissance de sa vassalité de me donner de l’or que j’enverrais à Votre Majesté. Il me répondit qu’il ne me donnerait l’or qu’il avait, que sur l’ordre de Muteczuma et que sur cet ordre, il donnerait son or, sa personne et tout ce qu’il possédait. Ne voulant point le blesser et me susciter des empêchements pour mon voyage, je dissimulai du mieux que je pus et lui dis que bientôt Muteczuma lui enverrait l’ordre de livrer son or et tout ce qu’il possédait.

J’eus aussi la visite de deux autres caciques propriétaires dans cette même vallée, l’un quatre lieues en aval, et l’autre deux lieues en amont, qui me donnèrent quelques colliers d’or de peu de valeur et sept ou huit esclaves femelles. Je partis au bout de quatre jours, laissant tout le monde satisfait, et je m’en fus à la demeure du cacique qui vivait à deux lieues de là, en amont, en un village appelé Iztacmastitan. Cette seigneurie comprend une population espacée sur une étendue de trois ou quatre lieues, où toutes les maisons se groupent et s’étalent le long d’un ruisseau dans le milieu de la vallée. Sur une colline très élevée se trouvent les palais du cacique avec une forteresse comme nous en avons peu en Espagne, avec ses murs, ses créneaux et ses fossés ; sur le haut de la colline habile une population de cinq ou six mille âmes dans de jolies maisons et paraissant plus riche que celle de la vallée. Là, je fus également bien reçu par le seigneur de l’endroit, qui me dit être aussi le vassal de Muteczuma.

Je restai trois jours dans ce village, tant pour reposer ma troupe des fatigues qu’elle avait endurées dans le désert, que pour attendre quatre messagers, Indiens de Cempoal, que, de Catalmi, j’avais envoyés dans une grande province appelée Tlascala, qu’on m’avait dit être voisine du village, et dont les habitants, disait-on, étaient leurs amis et les ennemis déclarés de Muteczuma. On m’engageait à contracter alliance avec eux, car ils étaient nombreux et fort aguerris ; leur territoire confine de tous côtés à l’empire de Muteczuma avec lequel ils avaient des guerres continuelles ; on croyait qu’ils se joindraient à nous et me porteraient secours dans le cas où Muteczuma entreprendrait quelque chose contre moi. Mais pendant les huit jours que je restai