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Lorsque j’arrivai au village de Nito, César invaincu, j’y trouvai les gens de Gil Gonzalez désorganisés et perdus. Ils m’apprirent que Francisco de Las Casas que j’avais envoyé pour me donner des nouvelles de Cristobal de Oli, comme j’en ai déjà fait mention à Voter Majesté, avait laissé à soixante lieues plus loin, en un port que les pilotes appellent Honduras, divers Espagnols, dont quelques-uns s’étaient établis dans le pays ; aussitôt que j’arrivai dans ce village et port de Saint-André, où je fondai, au nom de Votre Majesté, la ville de Nativité de Notre-Dame, pendant que j’y séjournais pour procéder à l’organisation de la municipalité et pendant que j’envoyais mes ordres au capitaine de Naco touchant la pacification de la province, j’envoyai le navire que j’avais acheté, à ce port de Honduras dans le but de s’informer des gens qui l’habitaient et de m’en rapporter des nouvelles. Je venais de terminer l’organisation de ma colonie, quand le navire revint, me ramenant le procureur du village et l’un des conseillers municipaux qui me supplièrent de me rendre chez eux pour les sauver d’une ruine certaine ; ils me dirent que Francisco de Las Casas les avait abandonnés, et qu’un des alcades nommé par lui, s’était enfui en leur emmenant cent dix hommes : de plus, il avait enlevé aux cent cinquante qui restaient, leurs armes, les ferrures et tout ce qu’ils possédaient, de sorte qu’ils craignaient chaque jour, ou de mourir de la main des Indiens, ou de mourir affamés, ne pouvant aller à la recherche des vivres.

Un navire était bien arrivé de l’île Espagnola, navire sous le commandement du bachelier Pedro Moreno, qui avait nettement refusé de les ravitailler comme on m’en expliquerait tous les détails au village. Je me rembarquai donc sur ces navires avec les plaignants et mes malades, dont quelques-uns avaient succombé ; je voulais d’abord les emmener d’ici, pour les envoyer plus tard dans les îles et à la Nouvelle-Espagne. Je pris avec moi quelques-uns de mes serviteurs et j’expédiai par la côte, où il y avait une bonne route, vingt chevaux et dix arbalétriers. La traversée me prit neuf jours par suite de gros temps. Lorsque nous eûmes jeté l’ancre dans ce port de Honduras, je sautai dans une barque avec deux religieux de l’ordre de Saint-Fran-