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d’une vingtaine de personnes qui ne m’attendaient guère. Je leur demandai s’ils avaient des vivres : ils me répondirent qu’ils n’en avaient pas et qu’on n’en pourrait trouver nulle part ; ce qui nous jeta dans une affreuse inquiétude, attendu, qu’il y avait deux jours que nous ne mangions que des cœurs de palmiers et pas toujours en quantité suffisante, car nous n’avions plus la force de les couper. L’un des officiers de l’hôtellerie me dit qu’à une journée de marche en amont de l’endroit où nous avions passé la rivière, il y avait une population nombreuse faisant partie d’une province appelée Tahuycal et qu’il y avait abondance de maïs, cacao, poules, etc., et qu’il me donnerait un guide pour m’y conduire. J’y expédiai immédiatement un capitaine avec trente soldats et plus de mille Indiens qui trouvèrent, grâce à Dieu, quantité de maïs ; tous les habitants avaient fui. Nous pûmes enfin nous approvisionner, quoique avec beaucoup de peine, vu la distance.

De ces hôtelleries, j’envoyai un certain nombre d’arbalétriers sous la conduite d’un guide, étudier le chemin que nous avions à suivre pour arriver à la province d’Acuculin ; ils atteignirent une hôtellerie de cette province, à dix lieues de Tenciz et à six lieues de la ville principale qui, je l’ai dit, se nomme Acuculin et le cacique Acahuilgin. Ils y arrivèrent sans avoir été signalés et dans l’une des maisons s’emparèrent de six hommes et d’une femme ; ils revinrent me disant que le chemin qu’ils avaient parcouru était parfois difficile, mais qu’il leur avait semblé beau, comparé à celui par où nous venions de passer. Je m’informai auprès de ces Indiens, des Espagnols que j’allais rejoindre : parmi eux se trouvait un habitant de la province d’Acalan qui me dit être marchand et qu’il avait son magasin dans le village même où se trouvaient les Espagnols ; que ce village s’appelait Nito, point où se réunissaient une foule de marchands de toutes les provinces ; que ceux d’Acalan y occupaient un quartier spécial sous les ordres d’un frère de Apaspolon et que les chrétiens les avaient attaqués une nuit, s’étaient emparés de leur quartier et avaient enlevé toutes les marchandises qui étaient en quantité considérable. C’est qu’en effet il avait là des marchands de toutes les nations qui, depuis un