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Santa Cruz, pacifiée, et de telle manière que si l’on voulait y établir une colonie, les Indiens seraient tous prêts à nous servir de travailleurs.

Les caciques furent très contents de ce que leur avait dit le capitaine de la part de Vos Altesses Royales et se montrèrent satisfaits des présents que nous leur fîmes, et nous sommes persuadés que les Espagnols, qui dorénavant pourraient venir à Cozumel, y seraient aussi bien reçus que dans toute autre terre déjà colonisée depuis longtemps. Cette île est petite ; elle n’a ni rivière, ni ruisseau ; toute l’eau que boivent les Indiens leur vient des puits. La surface de l’île se compose de collines ardues, de pierres et de forêts, de sorte que le principal travail des Indiens se borne à l’élevage des abeilles, et nos envoyés portent à Vos Altesses des échantillons de miel et des ruches, afin qu’elles puissent se rendre compte de cette industrie. Nous devons dire à Vos Majestés comment le capitaine s’adressa aux caciques de l’île, les exhortant à renoncer à leurs cérémonies païennes et comment les caciques lui demandèrent une loi nouvelle sous laquelle ils s’engageraient à vivre, et comme quoi le capitaine leur enseigna le mieux qu’il put la doctrine et les mystères de la religion catholique, leur laissant une croix de bois placée sur un de leurs monuments le plus élevé, en même temps qu’une statue de la Vierge Marie, leur expliquant en toute perfection ce qu’ils devaient faire pour être de bons chrétiens ; ce qu’ils écoutèrent avec plaisir, promettant de s’y conformer. En quittant l’île, nous gagnâmes le Yucatan dont nous suivîmes la côte nord jusqu’à ce que nous atteignîmes la grande rivière que l’on appelle Grijalva, rivière que, selon notre relation à Vos Altesses Royales, découvrit le capitaine Grijalva, parent de Diego Velazquez. La barre de cette rivière a si peu d’eau que pas un de nos grands navires ne put y pénétrer ; mais le capitaine Fernand Cortes, entraîné par son zèle pour le service de Votre Majesté et voulant lui adresser un rapport des plus exacts sur les produits de la contrée, résolut de ne point pousser au delà, avant de connaître ce fleuve, les gens qui en habitent les rives et les richesses qu’on les dit posséder ; il embarqua donc tous ses hommes sur les canots et les brigantins, et nous