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tout le monde l’entendit et mon lieutenant y répondit en faisant pointer les canons des deux vaisseaux qui lui étaient fidèles. Mais les officiers et pilotes des navires qui entouraient la galère capitane refusèrent d’obéir à l’ordre de Grijalva ; ce que voyant, celui-ci envoya un notaire appelé Vicente Lopez auprès de mon lieutenant pour tâcher d’arranger l’affaire. Mon lieutenant lui répondit qu’il n’était venu que pour négocier la paix, éviter les scandales et les troubles que soulevait la présence de ces navires en dehors du port de la ville où ils avaient l’habitude de se rendre ; qu’on pouvait les prendre pour des corsaires prêts à tenter un mauvais coup dans les possessions de Sa Majesté et que cela était d’un exemple déplorable.

Ces raisons eurent un tel effet, que le notaire Vicente Lopez alla retrouver Grijalva, lui répéta ce que lui avait dit mon lieutenant et l’engagea à se rendre. Il est évident, lui dit-il, que cet officier représentait Votre Majesté comme chef-justice de la province, et que le capitaine Grijalva savait bien que ni lui, ni Francisco de Garay ne pouvait exhiber aucun pouvoir de Votre Majesté, auxquels le lieutenant et les habitants de la ville de Santiesteban seraient tenus d’obéir, et que c’était chose scandaleuse que la conduite de ces navires, se comportant comme des corsaires dans les possessions de Votre Majesté Impériale. Convaincu par ces raisonnements, le capitaine Grijalva ainsi que les maîtres et capitaines des autres navires se conformèrent aux ordres de Valléjo, mon lieutenant, et remontèrent jusqu’à la ville. Une fois les navires ancrés dans le port, il fit arrêter Grijalva pour désobéissance à ses ordres ; aussitôt que le grand alcade eut appris cette nouvelle, il fit lever la condamnation et remettre Grijalva en liberté avec recommandation qu’on prît soin de lui et des siens, et qu’on ne touchât à rien de ce qui leur appartenait ; ce qui fut fait.

Le grand alcade, Diego Docampo, écrivit à Francisco de Garay qui se trouvait dans un autre port, à dix ou douze lieues de là, pour lui dire que je n’avais pu me rendre près de lui et qu’il me remplacerait, ayant tous mes pouvoirs pour régler les affaires pendantes ; Docampo et Garay devaient mutuellement