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un oncle de Don Fernando, roi de Tezcoco ; ce seigneur mexicain était blessé ; je lui demandai s’il voulait retourner à la ville ; il me dit que oui. Je le confiai donc à quelques-uns de mes hommes qui les remirent aux mains de ses compatriotes. Nous avions causé longuement, ce seigneur et moi, des choses qu’il fallait dire, et il m’avait promis de les répéter. Les gens de la ville l’accueillirent avec le plus grand respect, comme l’un de leurs seigneurs. Ils le conduisirent devant Guatimozin le jeune empereur à qui il voulait exposer mes propositions de paix, mais à peine eut-il ouvert la bouche que son maître le fit tuer et sacrifier. Pour toute réponse, je vis venir à moi les Mexicains poussant de grands cris, jurant qu’ils voulaient mourir et nous couvrant de dards, de flèches et de pierres, si bien qu’ils tuèrent un cheval d’un coup de lance fabriquée avec l’une de nos épées emmanchée sur un long morceau de bois. Ils perdirent encore en cette affaire une foule de monde et nous regagnâmes nos quartiers.

Le jour suivant, nous rentrons dans la ville où les Mexicains étaient dans un tel état d’accablement, que nos alliés osèrent passer la nuit dans Mexico. Arrivés en vue de l’ennemi, nous refusâmes de nous battre et nous nous promenâmes par la ville, nous attendant à chaque minute à les voir venir à nous ; pour les y encourager, je courus au petit galop jusqu’à l’une de leurs barricades bien fortifiée, j’appelai les chefs qui la commandaient, que je connaissais, et leur demandai pourquoi, se sachant perdus, puisque si je le voulais, en une heure, pas un d’eux ne resterait vivant ; pourquoi leur maître Guatimozin ne voulait pas venir me parler ? il savait bien que je ne lui ferais aucun mal, et que tous seraient les bienvenus à me parler de paix.

Je leur tins d’autres discours qui firent couler leurs larmes, et tout en pleurant, ils me répondirent qu’ils connaissaient leur sort, qu’ils allaient parler à leur maître et qu’ils me rapporteraient sa réponse. Je les attendis. Ils s’en allèrent et revinrent au bout d’un instant ; ils me dirent que l’empereur n’était pas venu parce qu’il était tard, mais que le lendemain à midi, il viendrait sûrement me parler sur la place du Marché. J’ordonnai