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tion des archers qui arrêtèrent l’élan de l’ennemi stupéfait de l’audace de Chichimecatl.

Quelques jours après le retour des Espagnols de Malinalco, dont j’ai parlé à Votre Majesté dans le chapitre précédent, dix Indiens otomies arrivèrent au camp. C’étaient, je l’ai dit, d’anciens esclaves des Mexicains qui s’étaient déclarés sujets de Votre Altesse, et qui nous suivaient dans nos attaques contre la ville. Ceux-ci nous dirent que les seigneurs de la province de Temascalcingo, leurs voisins, leur faisaient la guerre et ravageaient leurs terres : qu’ils leur avaient incendié un village et enlevé du monde ; enfin, qu’ils leur faisaient tout le mal qu’ils pouvaient : que, de plus, ils devaient venir nous attaquer afin que ceux de la ville pussent sortir et en finir avec nous. Je donnai d’autant plus de créance à cette histoire, que depuis peu de jours, chaque fois que nous nous battions avec les Mexicains, ils nous menaçaient des gens de Temascalcingo, Indiens inconnus de nous, habitant une grande province située à vingt-deux lieues de nos campements. Les Otomies nous demandaient des secours contre leurs voisins et le demandaient tout de suite, confiants dans l’aide de Dieu.

Pour couper court aux espérances des Mexicains qui chaque jour nous menaçaient de l’arrivée de secours qu’ils ne pouvaient recevoir que de ce côté, je résolus d’y envoyer Gonzalo de Sandoval avec dix-huit chevaux, cent fantassins et un seul arbalétrier qui le suivit avec un grand nombre de nos alliés otomies. Dieu sait à quels dangers ils allaient être exposés, et dans quel danger ils nous laissaient ; mais comme il convenait de montrer plus d’énergie et de courage que jamais et prouver que nous voulions mourir en combattant, nous dissimulions notre faiblesse aux yeux de nos amis comme à ceux de nos ennemis, car mes Espagnols répétaient souvent, qu’il plût à Dieu de leur conserver la vie et de leur accorder la victoire, qu’ils n’avaient plus sur terre, ni intérêt, ni espérance, ce qui prouve en quelle affreuse extrémité nous nous trouvions.

Sandoval s’en fut camper à un village otomie frontière de Temascalcingo et le jour suivant, de bonne heure, il partit et arriva dans quelques fermes otomies qu’il trouva désertes et en