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deux portées d’arbalète de nos quartiers. Comme nous y étions rentrés défaits, blessés et sans armes, il fallait nous reposer et nous refaire. Les Mexicains profitèrent de ces circonstances pour envoyer des émissaires dans toutes les provinces vassales, leur annoncer qu’ils avaient remporté une grande victoire, tué une foule d’Espagnols, que bientôt ils nous auraient tous exterminés et qu’elles ne fissent point la paix avec nous. Ils leur envoyaient comme preuves de leur victoire, les deux têtes des chevaux qu’ils avaient tués et d’autres dépouilles qu’ils nous avaient enlevées, les exhibant partout où besoin était et profitant de la circonstance pour remettre ces provinces sous le joug. Mais en somme, pour rabattre leur suffisance et qu’ils ne crussent point tant à notre faiblesse, chaque jour, quelques-uns des nôtres, cavaliers et fantassins, soutenus par des Indiens alliés, s’en allaient combattre dans la ville, sans trop de résultats, il est vrai, que la prise de quelques tranchées dans la rue qui mène à la place.

Deux jours après notre défaite, alors que la nouvelle en était répandue dans tous les pays, les habitants de Cuernavaca, anciens sujets de Mexico et qui étaient devenus nos alliés, vinrent à mon camp, pour me dire que les Indiens de Malinalco leurs voisins leur faisaient beaucoup de mal, ravageaient leurs terres et s’allaient joindre aux Indiens de Cuisco pour les attaquer et les exterminer, parce qu’ils s’étaient déclarés nos amis et sujets de Votre Majesté. Ils ajoutaient, qu’après les avoir défaits, ces Indiens marcheraient sur nous. Quoique nos malheurs fussent tout récents et que nous eussions plus besoin de secours que nous n’étions capables d’en donner, ces gens me le demandaient avec de telles instances que je ne pus leur refuser. J’y trouvai la plus grande opposition chez les miens, qui prétendaient que c’était me suicider, que de me priver de la plus petite force. Néanmoins, je fis accompagner ces Indiens par quatre-vingts soldats et dix chevaux sous les ordres d’Andrès de Tapia, à qui je recommandai de faire de son mieux pour le service de Votre Majesté et la sécurité de nos troupes dont il connaissait la position précaire ; je le priai, en outre, de ne pas rester plus de dix jours dans cette expédition. Il partit, et