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compris. Je les fis mettre immédiatement en liberté, les assurant que je les tenais pour loyaux serviteurs de Votre Majesté sacrée et que j’irais en personne attaquer les gens de Culua. Puis ne voulant montrer ni faiblesse, ni crainte aux naturels amis aussi bien qu’ennemis, je résolus de poursuivre cette campagne et, pour relever le courage de mes hommes, j’abandonnai toute autre affaire ; j’interrompis la relation que j’adressais à Votre Majesté et je partis sur l’heure pour Cholula où j’arrivai ce même jour. J’y trouvai mes Espagnols encore sous le coup du complot qu’ils m’avaient dénoncé.

J’allai passer la nuit à Guajocingo dont nous avions arrêté les personnages principaux ; le jour suivant, après m’être entendu avec les envoyés de Guaçachula, par où et comment je devais pénétrer dans la place, je partis une heure avant le lever du jour et j’arrivai vers les dix heures. À une demi-lieue de là, je trouvais des envoyés de la ville qui me dirent que les choses se présentaient le mieux du monde ; que les Mexicains ignoraient notre présence, attendu que les gens de la ville avaient enlevé leurs gardes et qu’ils s’étaient également emparés des sentinelles que les capitaines mexicains avaient placées sur les pyramides et les temples de la ville pour observer les environs ; que les ennemis reposaient en toute sécurité, comptant sur la vigilance de leurs gardes, et que je pouvais pénétrer dans la ville sans être signalé. Je m’avançai donc à toute vitesse au travers d’une plaine où l’on pouvait difficilement me voir, lorsque ceux de la ville m’ayant aperçu, comme nous étions déjà fort près, ils enveloppèrent aussitôt les maisons où se trouvaient les capitaines mexicains et les attaquèrent ainsi que les autres disséminés par la ville. Je n’étais plus qu’à une portée d’arbalète, quand ils m’amenèrent une quarantaine de prisonniers, ce qui ne m’empêcha point de précipiter ma course. La ville retentissait de cris et de hurlements ; j’avançais en combattant et, guidé par un naturel, j’arrivai à la maison occupée par les capitaine mexicains ; je la trouvai entourée par plus de trois mille hommes qui luttaient pour pénétrer dans l’intérieur, s’étant déjà rendus maîtres des plates-formes. Les capitaines et leurs Indiens, quoique en petit nombre, luttaient avec tant de bravoure que les