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pagnie anglaise qui allait à la Chine, pour revenir de là en Europe. Il vient de publier des Essais historiques sur l’Inde, précédés d’un Journal de voyages et d’une description géographique de la côte de Coromandel, volume in-12, de trois cent soixante pages. Cela n’est pas merveilleux. M. de La Flotte n’a pas le d’œil de M. Poivre ; mais il est de ces voyageurs en qui j’ai confiance. Ceux qui ont beaucoup d’esprit me font toujours appréhender qu’ils ne tirent les faits plutôt de leur imagination que de la réalité ; et s’ils ont l’esprit porté aux systèmes, ils perdent tout crédit dans le mien. Un esprit ordinaire rapporte les choses bonnement et pauvrement, comme il les voit : il se concilie ma confiance précisément parce qu’il ne songe pas à la captiver. On parcourt avec plaisir ces Essais sur l’Inde, quoique dépourvus de toute espèce d’agrément de style, et quoiqu’ils ne rapportent souvent que des choses communes et connues. M. de La Flotte est partisan secret, mais de bonne foi, de M. de Bussy, qui s’est fait prôner par ses avocats comme un autre Scipion, même quant à l’article de la continence. Je doute que la continence de Scipion de Bussy dans l’Inde devienne jamais un sujet de tableau pour nos peintres. Le hasard m’a procuré des notions très-particulières qui ne me permettent pas de me joindre aux prôneurs de Scipion de Bussy[1]. Quant au malheureux Lally, je me tiens au mot de M. d’Alembert, qui disait que c’était un frénétique qui méritait de mourir de la main de tout le monde, excepté de celle du bourreau.

— On a publié une Relation de l’île de Corse, ou Journal d’un voyage dans cette île, et Mémoires de Pascal Paoli, par Jacques Boswell, écuyer, traduit de l’anglais par J.-P.-J. Dubois[2]. Cet ouvrage, imprimé en Angleterre pour la première fois en 1767, jouissait d’une telle réputation, que le gouvernement de France crut devoir prendre des mesures pour empêcher la

  1. Grimm a déjà parlé du marquis de Bussy-Castelnau, tome VIII, page 506.
  2. J.-P.-J. Dubois, traducteur de la Relation de l’île de Corse par Jacques Boswell, n’a point d’article dans nos Dictionnaires historiques ; il était secrétaire privé de l’ambassade du roi de Pologne en Hollande. On a encore de lui les Vies des gouverneurs généraux des Indes orientales, avec l’Abrégé de l’Histoire des Établissements hollandais, La Haye, De Hondt, 1763, in-4°. Il a coopéré à neuf volumes de l’édition de l’Histoire générale des voyages, imprimée en Hollande avec des additions considérables, La Haye, De Hondt, 1747 et années suivantes, 25 vol.  in-4°. (B.)