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que les princes du sang, et dix ans plus tôt que les ducs et pairs et toute la noblesse. Personne ne leur conteste ce droit ; les maisons de Bouillon et de Rohan, n’ayant pu l’obtenir, se contentent de ne pas accepter le cordon bleu plus tard, et d’y renoncer entièrement. À la cérémonie de l’ordre, c’est-à-dire à la plus grande ou plutôt à la seule solennité qu’il y ait à la cour, hors les cas extraordinaires, les princes lorrains ont leur rang marqué entre les princes du sang et la noblesse. Ainsi lorsque M. le prince de Lambesc aura vingt-cinq ans, et que le roi l’aura décoré du cordon bleu, il précédera à la cérémonie, sans aucune difficulté, tous les maréchaux de France, tous les ducs et pairs, chevaliers de l’ordre. La maison de Lorraine jouit aussi du droit de présenter à la cour ses filles non mariées, tandis qu’aucune fille de qualité n’est présentée. Aux audiences solennelles des ambassadeurs des cours étrangères, lorsque le roi se couvre, les princes lorrains se couvrent aussi. Il est vrai qu’en ces derniers temps les ducs et pairs ont voulu s’arroger le même droit, et comme il ne leur a pas été accordé, ils se sont abstenus de se trouver à ces audiences ; mais une prétention non reconnue ne donne pas un droit. Au contraire, les distinctions de la maison de Lorraine, dont je viens de parler, sont reconnues sans difficulté, d’abord par le roi, qui les accorde, ensuite par la noblesse, qui ne songe pas à réclamer contre. Dire que MM. de Lorraine ne les ont obtenues que dans les temps où ils étaient favorisés dans leurs prétentions par les circonstances, c’est faire l’histoire de l’origine de toutes les distinctions du monde. On croirait donc, à ne consulter que ses lumières naturelles, et sans les secours d’une révélation et d’une théologie positive, que, parce que la maison de Lorraine est en possession de ces prérogatives, ce n’est pas une raison pour que Mlle de Lorraine doive danser la dernière au bal paré. Mais voilà où gît l’erreur, le commencement de l’hérésie et de la doctrine impie. La noblesse française soutient au contraire que c’est précisément le rang que les princes lorrains ont aux cérémonies de l’ordre, le droit que les princesses de Lorraine non mariées ont d’être présentées à la cour, qui doivent faire confondre Mlle de Lorraine au bal paré avec les femmes de qualité. Vous voyez que, dans les matières mystiques, rien n’est plus dangereux que de vouloir s’en rapporter aux principes du sens commun. L’étiquette, au-