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France ; nous ne sommes pas assez recueillis, assez solitaires ; nous ne pouvons lui accorder le temps dont il a besoin pour affecter. Un reproche plus réel que je fais à cette espèce de poésie, c’est le vague dans lequel elle fait nager son lecteur. On remarque dans Young et ses pareils plutôt une tête échauffée, une imagination exaltée, effarouchée, qu’un cœur profondément affecté ; on ne sait proprement de quoi il se plaint, quels sont ses malheurs ; on ne connaît pas les objets de sa douleur, quoiqu’il vous y ramène sans cesse. Il y a dans tout cela trop de cloches, trop de tombeaux, trop de chants et de cris funèbres, trop de fantômes ; l’expression simple et naïve de la vraie douleur ferait cent fois plus d’effet que toutes ces images : il s’agit de faire couler mes larmes, et non de m’effrayer comme un enfant par des images imposantes et terribles en apparence, mais qui n’effleurent pas mon âme, et n’y laissent aucune trace, aucun sentiment durable.

— Si l’on en croit un architecte de Paris nommé Patte, il faut renoncer à la construction de la belle église de Sainte-Geneviève ; c’est du moins ce qu’il entreprend de prouver dans une brochure intitulée Mémoire sur la construction de la coupole projetée pour couronner la nouvelle église de Sainte-Geneviève de Paris, où il est question de prouver que les piliers déjà exécutés et destinés à porter cette coupole n’ont point les dimensions nécessaires pour espérer d’y élever un semblable ouvrage avec solidité : problème adressé à toutes les sociétés savantes, aux ingénieurs, aux architectes, et à ceux qui se connaissent en construction ; par M. Patte, architecte de S. A. S. monseigneur le duc de Deux-Ponts. In-4o.

Vous voyez quel est le projet de l’auteur de cet écrit ; il veut prouver par la théorie de la poussée des voûtes que la tour du dôme et la coupole projetée par M. Soufflot, au centre de Sainte-Geneviève, sont inexécutables, et qu’il s’en faut près des deux tiers que les piliers déjà construits aient la force requise pour porter un semblable ouvrage avec solidité. On vient de lui répondre par un autre écrit intitulé Doutes raisonnables d’un marguillier de la paroisse de Saint-Étienne-du-Mont sur le problème proposé par M. Patte. Je crois cette feuille de Cochin[1].

  1. Elle a été, en effet, réimprimée au tome III des Œuvres de C.-N. Cochin.