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presse. Cela ne nous a pas avancés de grand’chose, et il y a bien deux ou trois ans que nous attendions. Le traducteur est aimable, il est paresseux, il a la Gazette de France à rédiger avec l’abbé Arnaud, il joue un rôle dans le parti philosophique, il aime le monde et les soupers en ville ; voilà bien plus de raisons qu’il n’en faut pour retarder l’accomplissement d’une promesse. En comparant sa traduction à l’original, vous la trouverez peut-être plus verbeuse et moins élégante ; vous remarquerez aussi un peu de langueur et de nonchalance dans le style. Le grand talent du traducteur consiste à se pénétrer de la manière de son original, et à tâcher de le rappeler par sa traduction ; mais nous n’avons pas le droit d’être si difficiles, et plût à Dieu que tous ceux qui se mêlent de nous enrichir de traductions eussent la facilité et la correction du style de M. Suard ! Cet ouvrage a eu beaucoup de succès.

M. l’abbé Mignot, abbé de Scellières, conseiller honoraire du grand-conseil, frère de Mme Denis, et par conséquent neveu de M. de Voltaire, vient de publier une Histoire de l’empire ottoman, depuis son origine jusqu’à la paix de Belgrade, en 1740, quatre volumes in-12 assez considérables. Ce neveu n’est pas le premier homme du siècle après son oncle ; il est un peu épais ; l’oncle s’étant emparé de toute la matière subtile ne lui a laissé que le caput mortuum. Cependant les oisifs qui ont fait de la lecture une ressource contre l’ennui liront le neveu, et n’en seront pas mécontents. Il prétend qu’il a pris beaucoup de peine pour nous donner une histoire véridique de cet empire ; il a étudié les traductions des manuscrits orientaux de la Bibliothèque du roi ; il a consulté M. de Cardonne, interprète du roi pour les langues orientales, qui a longtemps vécu en Turquie ; M. le duc de Choiseul lui avait permis de lire toutes les correspondances des ambassadeurs, au dépôt des affaires étrangères ; et de tout cela il est résulté un ouvrage tel quel.


15 avril 1771.

Après vous avoir parlé de la séance particulière que l’Académie royale des sciences tint le 6 mars dernier en présence du roi de Suède, il me reste à vous rendre compte de celle de l’Académie française, qui eut lieu le lendemain. Sa Majesté suédoise