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cier avec M. Fenouillot de Falbaire, et si Mmes Rozet et Chaumont étaient veuves, en convolant en secondes noces avec MM. de Falbaire et de Moissy, elles pourraient fonder la plus riche fabrique de mauvaises pièces qu’il y eût au monde ; l’ordonnateur Carmontelle s’y intéresserait pour un cinquième. Cette pousse prodigieuse et affligeante de petits taillis lorsque les arbres de haute futaie ont absolument disparu annonce la décadence prochaine et totale de la forêt, qui bientôt ne sera plus qu’une vaste et aride bruyère ; et si pour former des hommes et des citoyens, vous n’avez que des proverbes à faire jouer et des écoles dramatiques à ouvrir, vos maîtres d’école fussent-ils des Molière, je vous prédis que vous n’aurez bientôt pas plus d’hommes dignes de ce nom que vous n’avez d’auteurs.

M. Mercier, autre faiseur de drames qui ne sont joués ni sur les théâtres publics ni sur les théâtres particuliers, et qui, en revanche, ne sont lus de personne, vient d’en publier un nouveau, intitulé Olinde et Sophronie, drame héroïque en cinq actes et en prose, par M. Mercier, brochure in-8°. Le sujet de cette pièce est tiré de l’épisode du second chant de la Jérusalem délivrée. Le libraire de M. Mercier a dû être bien étonné du débit prodigieux de sa marchandise qui lui fut enlevée en moins de huit jours. Il est redevable de cette fortune inattendue a Aladin, roi de Jérusalem, et à Ismen, grand prêtre et premier ministre de ce prince, principaux acteurs de la pièce [1]. On a fait les applications les plus impertinentes de toutes les scènes d’Aladin et d’Ismen, principalement de la scène du troisième acte, et M. Mercier s’est trouvé l’homme du jour pendant près d’une semaine. Hélas ! il a composé son drame à l’ordinaire, dans la pauvreté de son esprit et dans l’innocence de son cœur ; et lorsque son censeur Crébillon y mit son approbation au mois d’octobre dernier, il ne prévoyait pas le bruit que ce drame ferait au moment de son apparition.

Mémoires d’un Américain, avec une description de la Prusse et de l’île de Saint-Domingue, apparemment à cause de leur voisinage, par l’auteur des Lettres d’Affi à Zurac et de celles d’un philosophe sensible[2]. Deux parties in-12. Cet auteur

  1. On crut reconnaître en eux Louis XV et le duc d’Aiguillon. (T.)
  2. J.-V. de La Croix.