Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 9.djvu/214

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sagère succombe à la longue sous les efforts de la haine et de l’envie secondés par les armes de l’oppression et de la tyrannie. Ce que j’ai vu se passer pendant vingt ans de suite sous mes yeux, au sujet de l’Encyclopédie, en serait, en cas de besoin, une preuve nouvelle. Cette entreprise, la plus considérable qui ait jamais été tentée et en littérature et en fait de commerce de librairie, a été achevée à la vérité, malgré toutes les persécutions qu’on lui a suscitées dès sa naissance ; mais je sais aussi que tous les genres d’oppressions qu’elle a essuyés lui ont porté des coups très-préjudiciables et ont efficacement nui à la perfection dont elle était susceptible. Le parti seul qu’on fut forcé de prendre après la publication du septième volume, de ne plus publier cet ouvrage successivement volume par volume, lui a fait un tort irréparable. Cette publication successive encourageait les uns, éclairait les autres, donnait à l’ouvrage, à mesure qu’il avançait, plus d’importance et de poids, et aux éditeurs les moyens de remédier dans les volumes à publier aux imperfections des volumes publiés en ce sens, les ennemis les plus acharnés concouraient à la perfection de l’Encyclopédie ; leurs clameurs éclairaient sur beaucoup de fautes et ne pouvaient nuire à ce qui était bien. Il fallut renoncer à tous ces avantages et prendre le seul parti qui restait, celui de ne plus publier qu’ensemble et à la fois tous les volumes qui manquaient. Le Parlement avait englobé l’Encyclopédie dans un arrêt de condamnation contre le livre de l’Esprit, ou plutôt on n’avait tant crié contre ce dernier ouvrage que pour en venir à l’Encyclopédie et pour l’envelopper dans la disgrâce

    suites par Diderot, et deux des épîtres de Voltaire à Catherine et au roi de Suède, nous les supprimons. Quelques-uns des articles du philosophe insérés dans les « ordinaires » du 1er septembre au 1er novembre sont inédits ; d’autres sont évidemment de lui, sans qu’ils soient distingués par aucun signe matériel, et nous nous contentons de soumettre nos conjectures au lecteur ; nous ne reproduirons pas en revanche ceux que M. Assézat a insérés dans les Œuvres complètes d’après les copies faites à Saint-Pétersbourg ou d’après les éditions Naigeon, Belin et Brière. Mme d’Épinay est représentée ici par un dialogue inédit : l’Amitié de deux jolies femmes, agréable écho des frivolités d’alors, et par quelques comptes rendus de théâtre qui révèlent un talent inconnu chez l’auteur des Conversations d’Émilie. Dans les années qui vont suivre, nous la retrouverons désormais et souvent, car sa coopération assidue à la Correspondance littéraire ne date que du moment où Grimm cessa d’être « faiseur de feuilles chambreland » pour devenir le personnage diplomatique affairé qu’il fut jusqu’à la Révolution.