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aux Choses utiles et agréables, dans lequel on ne trouve rien, ni de fort utile ni de fort agréable. Sophonisbe, tragédie de Mairet, réparée à neuf par le patriarche, est à la tête de ce volume. Elle est suivie de la véritable Sophonisbe de Mairet, telle qu’elle a été fabriquée, et dans laquelle on trouve un grand nombre de vers d’un ridicule rare. On voit ensuite une ancienne traduction française du Cymbalum mundi. Ce livre parut pour la première fois en 1537, et fit grand bruit. Il fut déféré par le roi et son chancelier au Parlement, qui informa contre l’auteur et l’imprimeur. Il fut qualifié par le roi comme contenant de grands abus et hérésies. L’auteur, Bonaventure des Périers, était valet de chambre de Marguerite de Valois, reine de Navarre et sœur de François Ier. On ne sait pas grand’chose de sa vie ; sa mort est plus connue : il se tua lui-même quelques années après la publication de son livre. Le patriarche est étonné du bruit que fit ce livre et de sa réputation, il le trouve assez plat, mais il faut considérer que la clef en est perdue, et que nous ne pouvons pas aujourd’hui sentir les allusions qui en firent la fortune dans le temps ; malgré cette difficulté, on sent qu’il ne devait pas manquer de sel. Après cet ouvrage, on a réimprimé le procès de Jean-Jacques Rousseau avec David Hume, recueil de pauvretés et de sottises qui n’aurait jamais dû paraître, et qu’il est bien plus inutile encore de remettre sous les yeux du public qui l’avait oublié. Les notes dont le patriarche l’a enrichi ne font pas honneur à sa modération. Il fallait bien moins réimprimer une lettre détestable de M. le marquis de Ximenès, que nous prononçons Chimène, sur la Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques ; ces ordures étaient bonnes à laisser dans le fumier où elles pourrissent. Ce volume est terminé par les Deux Siècles et le dialogue entre le P. Nicodème et Jeannot que vous avez vus à la suite de ces feuilles, et par un plaidoyer en prose de quatre pages pour Marie Culatin. On peut observer au patriarche que quand on écrit des plaidoiries dans ce goût-là, on perd le droit de dire du mal du Cymbalum mundi. Marie Culatin est l’Église romaine ; les dénicheurs, sa partie adverse, dont elle se plaint, sont les philosophes : voilà ce qu’il faut savoir pour comprendre quelque chose à ce vilain plaidoyer. Vous voyez que tout ce volume se réduit à bien peu de chose ; mais les deux dernières pages, je les trouve excellentes.