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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

soyez, s’il se peut, moins blessé de me l’entendre dire ; et, cet air de raillerie vous faisant me croire on ne peut pas moins touchée de vos peines, il arrive que ce que je ne fais que par un motif dont vous devriez me savoir gré, ne vous en rend que plus à plaindre. »

Voici maintenant un échantillon du ton de madame la duchesse :

« Vous ne m’en croirez, peut-être, pas ; mais à de certaines conquêtes que je fais par-ci par-là, j’ai quelquefois bien du regret d’être si jolie. Pour vous, monsieur le duc, je crois, à la façon dont je me suis conduite avec vous, n’avoir pas besoin de vous dire que ce n’est point du tout la vôtre que je me reproche. Celle-là ! Tubleu ! »

Quant à moi, madame la duchesse Tubleu, je crois n’avoir pas besoin de vous dire que quand j’ai l’honneur de vous souhaiter le bonsoir, ce n’est point du tout pour vous ôter la commodité d’aller vous faire… soldat aux gardes.




DÉCEMBRE.

15 décembre 1768.

Le séjour que le roi de Danemark vient de faire en France n’est du ressort de cette correspondance qu’en ce qui concerne les arts et les lettres, et l’hommage qu’ils ont rendu à Sa Majesté. Cet hommage n’a pas toujours été également pur ; on a accablé ce jeune monarque de spectacles, de fêtes et de bals ; et presque partout c’est Poinsinet qui a été l’organe des louanges qu’on lui adressait et l’auteur des couplets qu’on lui chantait. On dit que quelques-uns de ces couplets étaient assez jolis ; mais je regarderai toujours comme un fâcheux symptôme que Poinsinet ait été l’orateur de l’élite de la nation. J’ose croire aussi qu’un peu moins d’empressement, moins de bruit, plus de calme et un d’intermittence dans les fêtes, auraient rendu au roi de Danemark son voyage plus agréable, et auraient été plus conformes à la dignité d’une grande nation. Au reste, si