Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 15.djvu/351

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

constitution politique, les tribunaux, l’inquisition, les forces de terre et de mer, le commerce et les manufactures, principalement celles de soieries et de draps, etc. ; ouvrage dans lequel on a présenté avec impartialité tout ce qu’on peut dire de plus neuf, de plus avéré et de plus intéressant sur l’Espagne depuis 1782 jusqu’à présent ; trois gros volumes in-8o[1].

Nous ne croyons pas qu’il existe dans ce moment, en aucune langue, un livre qui soit aussi propre à faire connaître l’Espagne telle qu’elle est aujourd’hui sous autant de rapports, avec plus d’exactitude et de vérité. Ce n’est ni un ouvrage profond, ni un ouvrage brillant, mais on y trouve partout l’empreinte d’un esprit sage et mesuré, d’un bon esprit qui cherche à bien voir, et qui juge tout ce qu’il voit avec une grande impartialité. Ce nouveau tableau de l’Espagne est de M. le chevalier de Bourgoing, élève de l’École militaire, qui a passé plusieurs années en Espagne avec M. le comte de Montmorin, et qui est dans ce moment ministre du roi à Hambourg ; c’est lui du moins qui en avait rassemblé tous les matériaux. Les occupations dont il est chargé ne lui ayant pas permis d’en achever entièrement la rédaction, il en a laissé le soin à son ami, M. l’abbé Girod, qui parcourut lui-même une grande partie de l’Europe, et qui eut l’honneur d’accompagner Mgr le comte d’Artois au siège de Gibraltar.

— Chaque jour, chaque heure, pour ainsi dire, voit éclore quelque nouvelle brochure, quelque nouveau volume sur les états généraux, et si l’on rassemble tous ces écrits à la Bibliothèque du roi, l’on y comptera très-incessamment plus de volumes encore sur la constitution de la monarchie qu’il n’y en a déjà sur la constitution Unigenitus ; car sur cette grande et belle question, il n’y en a, dit-on, guère au delà de dix mille. Ne pouvant parler en détail de toutes les productions patriotiques du moment, il faut bien choisir. L’une d’elles, qui nous a paru mériter le plus d’attention, quoiqu’un peu trop métaphysique pour faire tout l’effet qu’eût désiré l’auteur, est intitulée de la

  1. Quoique cet ouvrage porte le millésime de 1789, il fut publié dans les derniers mois de 1788 ; une quatrième édition parut en 1807 sous le titre de Tableau de l’Espagne moderne, avec le nom de l’auteur et un atlas in-4. — Jean-François baron de Bourgoing parcourut avec succès la carrière diplomatique ; ministre plénipotentiaire à Hambourg, envoyé de Louis XVI en Espagne jusqu’à la Révolution, il fut depuis ambassadeur à Copenhague, à Stockholm et enfin à Dresde, où il mourut en 1811, âgé de soixante-quatre ans. (Ch.)