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NOUVELLES LITTÉRAIRES.

grande beauté. Son dessin est fin, élégant et fini. Il excelle surtout à faire des portraits en bague fort ressemblants. Il est supérieur à feu Barier, qui était très-bon.

Roettiers père et fils sont deux excellents graveurs en médailles aussi bien que Marteau qui, de plus, grave en pierres fines.

— Les Comédiens français ont donné deux représentations d’une petite pièce nouvelle intitulée le Billet perdu. Le fond de cette agréable bagatelle est une tracasserie de société. Il n’y a ni suite ni intrigue dans cette comédie. Ce sont quelques portraits fort chargés, faits sans occasion par un petit maître d’un style plus ingénieux que facile. Les femmes ont été si révoltées des horreurs qu’on y dit d’elles qu’on a été obligé d’affaiblir beaucoup de choses, d’en retrancher d’autres et enfin de changer le titre de la pièce, qui sera jouée la troisième fois sous le titre de l’Impertinent. Gresset disait qu’il faudrait l’intituler l’Indécent. Les deux dernières scènes, qui sont les seules théâtrales, sont de l’abbé de Voisenon. Cet ouvrage, tel qu’il est, fait honneur à M. Desmahis, parce qu’on y a trouvé de l’esprit et du style. On s’accorde à dire que c’est une copie du Méchant.

— On vient de faire à Paris une édition de la Fable des Abeilles, ouvrage traduit de l’anglais de Mandeville[1]. Le but de ce livre est de prouver que les vices sont essentiels à la société. J’ai trouvé dans ces quatre volumes des longueurs, des répétitions, des obscurités, des épisodes, des paralogismes et des choses lumineuses et profondes sur la politique, la philosophie et la religion.

— On a fait une édition des comédies de Regnard, qui est jolie et dans laquelle il y a quelques augmentations[2].

— On vient de donner au théâtre de l’Opéra trois nouveaux actes[3] : Les paroles, qui sont ridicules, sont de Moncrif, et la musique est de trois musiciens différents. Celle d’Almasis, qui

  1. La première édition de la traduction de J. Bertrand est de Londres (Amsterdam), 1749, 4 vol.  in-8.
  2. Cette édition (Paris, 1750, 4 vol.  in-12) est la première qui contienne le Carnaval de Venise, opéra imprimé en 1669.
  3. Almasis et Ismène avaient d’abord été représentés sur le théâtre des petits appartements à Versailles. Ils firent ensuite partie, avec Linus, d’un spectacle coupé qui eut, selon M. de Lajarte, vingt-quatre représentations consécutives, ce qui était un succès pour l’époque et ne justifie guère le dire de Raynal.