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NOUVELLES LITTÉRAIRES.

lui donnent de l’agrément. Quoique le style de cet ouvrage soit extrêmement faible et sans ornement, il est supportable parce qu’il est clair et naturel. L’auteur ne pense pas profondément, mais il a du sens. Je crois que les négociateurs n’y apprendront pas grand’chose ; mais le commun des honnêtes gens prendra quelques idées assez justes du manège ordinaire des cours et de beaucoup d’usages.

Les Petites Nouvelles parisiennes[1]. C’est un recueil d’histoires joliment imprimées qui réussit beaucoup. Le public ne s’est pas aperçu que la plupart sont tirées du Sylphe aérien, ouvrage que l’équivoque du titre a fait attribuer à Crébillon. Il a fait effectivement un Sylphe, mais c’est le Sylphe tout court. Le Sylphe aérien n’est que médiocre, ainsi les Petites Nouvelles parisiennes ne sauraient être excellentes.

Amusements d’un prisonnier, deux parties[2]. C’est un militaire, détenu dans une prison pour une affaire d’honneur, qui conte ses aventures galantes. Le fond de ce roman est usé et la forme n’en est pas agréable ; c’est un de ces petits riens dont, quand on a un peu de goût, on s’amuse un jour, mais dont on ne se souvient pas le lendemain.

La Force de l’éducation, deux volumes[3]. C’est un roman qui réussit beaucoup, et dont voici l’idée :

Le comte de Saint-Eugène avait été envoyé secrètement en Angleterre par le cardinal Mazarin. Le rôle qu’il devait y jouer l’obligea de changer de nom. Il prit celui de baron de Cromstad. Sous ce déguisement, il devint amoureux de miss Naugton, fille d’un des plus riches négociants d’Angleterre. Elle portait déjà le fruit de leur tendresse, lorsque le comte, qui l’ignorait, repassa en France, après avoir heureusement exécuté sa commission. Le cardinal lui fit bientôt après épouser Mlle de Villemard, dont il eut une fille qu’on nomma Adélaïde. Elle fut confiée à une nourrice nommée Soclet, qui avait une fille âgée de deux mois. Miss Naugton avait mis au monde le fruit de ses amours, qu’elle appela du prétendu nom du père, le baron de Cromstad. Après

  1. (Par L.-F. Delatour, imprimeur et littérateur.) Paris, Delatour, 1750, in-18. Tiré à petit nombre pour présents. Le Sylphe aérien est resté inconnu aux bibliographes.
  2. Paris, 1750, 2 vol.  in-12.
  3. Par l’abbé Aunillon.