— Confrère, lui répond le prêtre,
Ce que tu dis pourrait bien être :
Du siècle je suis le rebut ;
Mais le bon goût n’a qu’à paraître,
Alors nous serons but à but. »
— On soupçonne le chevalier de Mouhy d’être auteur des Mémoires de Poligny, qui viennent de paraître[1]. Ce roman me paraît assez mauvais pour être de lui. Poligny, dans le cours de ses voyages, voit à La Haye Mlle de Rohancy, dont il devient amoureux et qu’il rend amoureuse de lui. Des incidents, qui font le nœud de la fable, les empêchent d’être l’un à l’autre. Poligny, de retour dans sa patrie, est uni à une jeune personne pour laquelle il n’a point de goût. Quelque temps après, Mlle de Rohancy vient se présenter en homme pour servir sa rivale ; c’était un déguisement qu’elle avait imaginé pour voir de plus près son amant. Un évanouissement tout à fait malheureux instruit Mme de Poligny du sexe de son valet de chambre. Un aveu naïf raccommode tout. Mme de Poligny est apaisée, et les deux rivales ne se quittent plus. Une femme de chambre qui avait du goût pour le prétendu valet de chambre devient jalouse et avertit Poligny. Il les surprend un jour couchées ensemble et les perce toutes les deux. Mme de Poligny, avant d’expirer, reproche à Poligny sa cruauté et son erreur, et lui montre l’objet qu’il vient d’assassiner. Le meurtrier se condamne à un exil éternel, et c’est dans cet exil qu’il a écrit ses mémoires.
Le fond de ce roman est extrêmement usé ; les incidents, trop multipliés et trop romanesques, le style diffus, plat et trivial. Cet ouvrage a eu le sort qu’il méritait, on n’en a pas parlé vingt-quatre heures.
— L’Ombre du grand Colbert, le Louvre et la Ville de Paris. Dialogue[2]. Tel est le titre d’un ouvrage qui a paru hier et qui ne peut manquer de faire du bruit. C’est une satire en prose contre notre ministère, accusé de ne point connaître et de ne pas aimer les beaux-arts. Il résulte de la lecture de ce livre que les