— Je viens de lire les Recherches sur l’Origine des idées que nous avons de la beauté et de la vertu[1]. Cet ouvrage, traduit de l’anglais par M. Eidous, est écrit avec un grand appareil de métaphysique. Quand on a essuyé tout l’ennui d’un ouvrage sec, scolastique, embarrassé, on s’aperçoit qu’on a pris une peine infinie pour entendre ce qu’on savait avant d’avoir ouvert ce livre.
— On m’apporte à l’instant trois romans nouveaux et deux tragédies ; l’une est le Xercès de Crébillon, l’autre la Mérope de M. Clément. J’aurai l’honneur de vous entretenir de tout cela dans ma première lettre.
— Un homme riche, et cependant bon citoyen, a entrepris de nous redonner Plutarque, mais Plutarque corrigé. Il en a ôté les trop longues moralités, les digressions fréquentes, la confusion presque continuelle qui règne dans les faits rapportés par ce célèbre écrivain, et il y a ajouté tout ce qu’il a trouvé dans les autres historiens de propre à faire plus particulièrement connaître les grands hommes dont Plutarque a donné la vie. Le traducteur, pour sonder le public, vient de donner les Vies de Solon et de Publicola[2]. Je crois qu’on le dispensera de publier la suite ; il a ôté de son ouvrage tout le sel et tout le bon sens qui caractérisent son modèle.
— Le poëte Roy qui passe sa vie à médire de l’Académie française, m’avait lu, il y a plus d’un an, une épigramme dans laquelle il se compare à Hercule, et les membres de l’Académie à un peuple de pygmées. Il vient de faire courir cette épigramme, et l’a appliquée à Crébillon et à ses censeurs :
Un jour tout le peuple pygmée.
De taille au-dessous de fourmi,
Sur le bon Hercule endormi
Vint s’assembler en corps d’année.
Tout ce camp, d’aiguillons muni,
À le picoter s’évertue.
Que fait Hercule ? Il éternue,
Et voilà le combat fini.